CIBC logo

Réussir la succession d’entreprise : un impératif économique

18 févr. 2025Moteurs de croissance
Partager

L’économie canadienne est profondément ancrée dans l’entrepreneuriat. En effet, les entreprises familiales et privées sont les chefs de file de la création d’emplois et de la diversification économique depuis des décennies. Le Canada se trouve maintenant à un moment crucial : le transfert harmonieux de la propriété et du leadership des PME à la prochaine génération.

Trois propriétaires d’entreprise sur quatre ont l’intention de passer le flambeau de leur entreprise au cours des 10 prochaines années, selon la Fédération canadienne de l’entreprise indépendante (FCEI). Cela représente un transfert massif de plus de 2 000 milliards de dollars en actifs d’entreprise. Il s’agit d’un moment déterminant pour la résilience économique, l’innovation et la croissance du pays.

Si elle est mal gérée, la période de transition pourrait entraîner des fermetures d’entreprises, éliminer des emplois et des services clés dans les collectivités et mener à un affaiblissement de l’économie nationale. À l’inverse, une transition réussie à une nouvelle génération dynamique de propriétaires d’entreprise pourrait créer des occasions inégalées de favoriser la prospérité des Canadiens à long terme.

Un milieu des affaires en évolution

Ce moment arrive pour le Canada dans un contexte de difficultés économiques. Nos PME ont fait face à d’importants défis dans les années 2020, qu’il s’agisse des perturbations de la chaîne d’approvisionnement, de l’inflation, de l’augmentation des coûts d’emprunt ou de la concurrence croissante des grandes plateformes mondiales et de commerce électronique. Des questions demeurent relatives aux politiques douanières des États-Unis. Bien qu’il existe un risque de différend commercial plus important, de nombreux membres du milieu des affaires croient qu’un règlement négocié demeure fortement possible.

Toutefois, même avant la pandémie de COVID-19, les PME canadiennes éprouvaient des difficultés. Nous avons vu moins de sociétés à croissance élevée en raison de la faible croissance économique, de la difficulté à trouver et à attirer de la main-d’œuvre et du sous-investissement. Les résultats sont clairs. Selon Statistique Canada, avant 2001, le Canada et les États-Unis avaient connu une croissance de la productivité semblable pendant quatre décennies. Toutefois, au cours des 20 dernières années, le taux de croissance de la productivité des États-Unis a légèrement diminué pour atteindre 2 % par année, tandis que celui du Canada a fléchi davantage pour s’établir à seulement 0,9 % par année.

La grande incidence des PME

Les PME emploient près de 70 % de la main-d’œuvre du secteur privé et sont à l’origine de près de la moitié (43 %) de tous les gains d’emploi, selon le Laboratoire de données sur les entreprises de la Chambre de Commerce du Canada.

Trouver de nouveaux propriétaires pour soutenir et faire croître ces entreprises est notre meilleur moyen de stimuler la croissance économique et de favoriser la productivité au cours de la prochaine décennie et au-delà. À l’heure actuelle, de nombreuses PME ne font pas les investissements nécessaires en matière de technologie pour améliorer leur productivité et réduire leurs coûts. La situation pourrait changer avec une génération de propriétaires plus jeunes, qui sont plus à l’aise avec la technologie et qui sont prêts à faire des investissements à long terme qui portent leurs fruits à long terme pour mettre à niveau les systèmes, expérimenter avec des outils numériques et automatiser les processus.

Si nous échouons à transférer nos PME entre les bonnes mains, nous pourrions assister à une augmentation des fermetures d’entreprises partout au pays et à l’érosion du patrimoine familial accumulé par les propriétaires au fil des années. La période nécessaire pour redresser le bilan en matière d’innovation et le taux de productivité du Canada serait encore plus longue.

L’histoire de deux ventes

Les propriétaires d’entreprise du Canada connaissent bien les enjeux pour eux-mêmes et leurs collectivités locales. Un propriétaire de Windsor, en Ontario, qui a bâti son entreprise pendant 30 ans, a clairement indiqué pendant le processus de vente que sa priorité était de conserver les 250 emplois de sa société dans la collectivité.

Lorsque nous lui avons demandé pourquoi il s’agissait de sa principale priorité, il a expliqué que la santé de l’économie locale de Windsor dépendait d’entreprises comme la sienne.

Une entreprise de taille semblable dans le Canada atlantique fait face à un résultat très différent, après qu’un transfert ne se soit pas déroulé comme prévu. Un acheteur potentiel a retiré son offre lorsque les conditions du secteur ont changé. Maintenant, le propriétaire a des problèmes de santé. L’avenir de l’entreprise est incertain. S’il est impossible de trouver le bon acheteur, l’entreprise pourrait faire faillite, mettant en péril des emplois et une partie de l’économie locale.

La crainte actuelle est que les employés chevronnés et ambitieux se tournent vers d’autres occasions et que les investissements en capital nécessaires prennent du retard pendant cette période d’attente. Imaginez si cette situation arrivait non seulement à cette entreprise, mais aussi à des milliers d’entreprises à l’échelle nationale.

Une nouvelle ère de propriété

La tâche nationale consistant à transférer les trois quarts de nos PME à de nouveaux propriétaires doit être prise en charge dès maintenant. C’est particulièrement vrai puisque certaines entreprises pourraient être plus difficiles à vendre que d’autres.

On s’inquiète de plus en plus du fait que seulement 9 % des entreprises canadiennes ont mis en place un plan de relève officiel. De récentes recherches de la FCEI montrent que le successeur a tendance à obtenir de meilleurs résultats lorsque le transfert est effectué conformément à un plan de relève officiel.

Selon KPMG, près de 80 % des propriétaires préféreraient transférer leur entreprise à un membre de leur famille. Toutefois, au bout du compte, la majorité d’entre eux vendent à un acheteur non apparenté (49 %), tandis que 24 % vendent à un membre de leur famille et 23 % à leurs employés. Ratisser large pour dénicher le bon successeur est important pour la réussite à long terme de notre secteur des PME. Selon une recherche de Deloitte, seulement 30 % des entreprises familiales survivent jusqu’à la deuxième génération (les autres échouent ou sont vendues), 12 % survivent jusqu’à la troisième génération et seulement environ 3 % exercent leurs activités jusqu’à la quatrième génération et au-delà.

Le Canada compte 100 000 entrepreneurs de moins aujourd’hui (lien en anglais seulement) qu’il y a 20 ans, mais la tendance pourrait s’inverser en faveur de la propriété de PME. Les jeunes d’aujourd’hui entrent sur un marché du travail inégal et pourraient être intéressés par cette occasion unique d’acheter une entreprise existante. Nous devons mieux faire connaître les avantages potentiels de ce cheminement de carrière : une entreprise établie permet au nouveau propriétaire de réussir grâce à des flux de trésorerie immédiats, à une clientèle existante, à la reconnaissance de la marque et à des employés formés. Bien que le prix initial soit plus élevé, la baisse des taux d’intérêt et un régime fiscal plus progressif pourraient être avantageux pour le nouveau propriétaire.

La propriété future des PME du Canada doit être au cœur de notre planification économique. Les actifs délaissés et les ventes infructueuses d’entreprises ne sont pas seulement un problème pour le vendeur. Ils représentent une occasion ratée pour l’ensemble de l’économie. Si, au lieu de cela, nous pouvons transmettre harmonieusement ces entreprises à la prochaine génération de propriétaires et d’entrepreneurs, nous pourrons assurer la création d’emplois bien rémunérés, remédier au retard dans la productivité et améliorer notre niveau de vie.

Contributeurs

Scott Brown

Premier vice-président, Ontario & Prairies

Groupe Entreprises CIBC

Iain Gallagher

Directeur général, Banque d’investissement - Marché intermédiaire, Financement des sociétés

Groupe Entreprises CIBC