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Fonds d’états Autochtones: catalyseurs d’une prospérité durable

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Une mère et un père autochtones sourient à leurs trois jeunes enfants.

Depuis le milieu des années 1970, le gouvernement fédéral a réglé des centaines de revendications avec les communautés autochtones afin de corriger des préjudices historiques, de régler des conflits territoriaux et de respecter les droits issus de traités. Cela a entraîné un transfert important et attendu depuis longtemps, en milliards de dollars, aux communautés autochtones.  

 Ces règlements jouent un rôle important dans le parcours du Canada vers la réconciliation et la justice pour les communautés autochtones, et il y en a beaucoup d’autres à venir.  

Au cours des 50 dernières années, le Canada a réglé près de 700 revendications particulières seulement, c’est-à-dire des revendications pour mauvaise gestion des terres, appropriation et violation des droits issus de traités. Ces règlements totalisent plus de 14,7 milliards de dollars, la moitié d’entre eux ayant été réglés au cours des quatre dernières années. Cela ne veut rien dire des 640 cas toujours en attente ou des innombrables demandes de règlement qui n’ont pas encore été déposées. Il n’est pas non plus question des revendications globales, des demandes d’annuités de traités ou des recours collectifs, qui sont nombreux; un récent recours collectif a permis d’obtenir un règlement de 23,3 milliards de dollars.  

Les sommes représentent non seulement une reconnaissance des préjudices du passé, mais aussi un espoir pour l’avenir, une occasion sans précédent pour de nombreuses communautés autochtones de trouver de nouvelles voies vers la prospérité et de bâtir un avenir plus solide et plus durable.   

Pourtant, des défis demeurent. Les communautés autochtones qui font des progrès en faisant valoir leurs droits juridiques et en concluant des règlements font face à des défis juridiques et systémiques en ce qui a trait à la gestion et à l’administration subséquentes des fonds de règlement.   

Manque  de confiance

Les fiducies, un instrument financier vieux de plusieurs siècles, demeurent le principal mécanisme choisi par les communautés autochtones pour détenir et gérer les fonds de règlement. Comme je l’ai suggéré dans un article antérieur, bien qu’ils puissent être le fondement de la planification successorale, ils présentent de graves lacunes lorsqu’ils sont utilisés comme outils de gestion de patrimoine par les communautés autochtones.  

Tout d’abord, la structure de gouvernance des fiducies exige généralement une gestion distincte de celle de la collectivité dont les actifs sont administrés. Cette gestion distincte élimine le contrôle des actifs de la communauté autochtone et crée également des difficultés à s’assurer que l’utilisation des fonds en fiducie correspond aux priorités de cette communauté.    

De plus, des restrictions législatives exigent l’adoption de stratégies de placement extrêmement prudentes, principalement axées sur la préservation du capital et la minimisation du risque. Bien qu’une stratégie de placement équilibrée et prudente ne soit pas nécessairement une mauvaise chose, elle empêche souvent une communauté autochtone de réinvestir en elle-même d’une manière qui cadre avec ses objectifs de développement économique.  La préservation du capital de la fiducie l’emporte sur la valeur de la croissance et du développement économiques.  

Par exemple, les demandes des communautés autochtones visant à utiliser des fonds en fiducie pour financer des projets sur leur territoire ne respectent généralement pas la norme de l’investisseur prudent prescrite par la loi sur les fiducies. Bien que ces projets ne soient pas particulièrement risqués, ils ont tendance à ne pas respecter les limites permises d’une stratégie de placement équilibrée. De même, les demandes d’utilisation de biens en fiducie comme garantie pour des prêts sont souvent interdites par l’acte de fiducie, ce qui limite davantage l’utilisation des biens par la collectivité pour soutenir le développement économique.    

Malgré ces restrictions, il existe quelques solutions de rechange pour la gestion à long terme de ces actifs.  

Quelque chose de différent

Compte tenu du transfert sans précédent de richesse aux communautés autochtones, il est temps de combler les lacunes inhérentes aux structures juridiques existantes et de créer une entité mieux adaptée pour gérer le capital tout en permettant un développement économique progressif. L’objectif de préservation du capital doit être contrebalancé et assorti de la souplesse nécessaire pour soutenir l’autonomie économique et autonomiser les communautés autochtones.  

La création d’un fonds d’État autochtone est une option prometteuse, comme le recommande la National Aboriginal Trust Officers Association.    

Ces entités pourraient être créées et structurées d’une manière semblable aux fonds d’État traditionnels exploités partout dans le monde par des gouvernements nationaux et infranationaux, y compris au Canada. L’objectif ultime de ces fonds pourrait être semblable à celui des fiducies existantes : gérer les fonds de règlement pour soutenir les collectivités d’aujourd’hui tout en préservant les fonds pour les générations futures et au sein d’une structure de gouvernance qui optimise les rendements ajustés au risque.  

Mais ces fonds pourraient aussi être fondamentalement différents. La principale différence réside dans la portée et l’ambition. De par leur nature, les fiducies ont une portée plus étroite et sont structurées de manière à gérer prudemment les actifs et à procurer un flux de revenus régulier aux bénéficiaires. Les fonds d’État autochtones seraient conçus pour gérer le patrimoine collectif dans l’intérêt général à long terme des communautés autochtones.   

Ces fonds pourraient incarner l’autodétermination, un véritable rapatriement de la richesse vers la communauté.   

Cet objectif ne serait pas difficile à atteindre, mais il nécessiterait beaucoup de travail. Toutefois, en raison d’un véritable engagement à l’égard de la réconciliation et de l’équité financière, ce travail est impératif.  

Une toute nouvelle entité

Une toute nouvelle entité juridique doit naviguer dans les cadres réglementaires, établir des structures de gouvernance et renforcer les capacités des parties intéressées. De solides mécanismes de surveillance et d’évaluation devront être établis.  

La loi devrait reconnaître la souveraineté inhérente des nations autochtones sur la gestion de leurs actifs financiers et inclure des dispositions relatives à la propriété, à la structure de gestion, aux exigences de déclaration et même aux lignes directrices sur les placements.   

Il faudrait allouer des fonds pour faciliter les programmes de renforcement des capacités et d’aide technique.   

Bien entendu, la première étape consiste à mobiliser les communautés autochtones d’une manière qui reconnaît qu’elles ne sont pas un groupe homogène, mais qu’elles ont des structures de gouvernance et des besoins différents. Il s’agirait d’une entreprise sur mesure, et le cadre juridique doit en tenir compte.  

La gouvernance sera essentielle. Les fonds d’État devraient être à l’abri des débats politiques. Par exemple, l’interdiction de liquider un fonds sur un coup de tête devrait être extrêmement prohibitive.  

La loi décrirait les obligations fiduciaires des administrateurs de gérer ces actifs au nom des bénéficiaires, comme le fait la loi pour les fiduciaires en vertu de la Loi sur les fiduciaires ou les conseils d’administration en vertu de la Loi canadienne sur les sociétés par actions.  

En fait, les fonds d’État ressembleraient probablement à un hybride entre une fiducie et une société.   

Tout le monde sait ce qu’un administrateur de société est censé faire et quelles obligations il doit à la société elle-même et aux actionnaires. La législation est raisonnablement détaillée à ce sujet et peut indiquer comment attribuer des droits à toutes les parties pertinentes à toute nouvelle structure de fonds d’État.  

​Il est certain que la création d’un tel outil nécessiterait un leadership gouvernemental important et une collaboration avec les leaders autochtones. Il s’agirait d’une opération lourde sur le plan juridique, qui nécessiterait la création d’une nouvelle entité juridique.  

Toutefois, la progression de la réconciliation économique devrait être le principe directeur.  

Les fonds d’État renforceraient les pouvoirs financiers des peuples autochtones, leur permettant non seulement d’exercer leur droit à l’autonomie gouvernementale, mais aussi de tirer parti de leurs actifs pour investir dans leurs propres collectivités.  

C’est également très logique sur le plan économique pour tous les Canadiens.  

Un tel instrument débloquerait des milliards de capitaux à investir au Canada, plutôt que sur les marchés financiers mondiaux, ce qui amplifierait les avantages partout au pays.   

Marchés autochtones

La Banque CIBC s’engage à offrir des services financiers personnalisés et accessibles à ses clients des Premières Nations et des peuples métis et inuits au Canada.

Pour en savoir plus
Contributeurs

Jaimie Lickers

Première vice-présidente, marchés autochtones

Groupe entreprises CIBC